de taumataroa » 26 Aoû 2014, 23:46
Cela ne sera pour cette rentrée semble-t-il.
Mais faudra-t-il vraiment attendre quelque chose de cette réforme annoncée lors du dernier congrès de l’UDPPC ? Il faut croire que non, car au constat pragmatique et alarmant dressé par V.Parbelle président de UDPPC, tant sur le plan des programmes et des connaissances que sur celui de l’orientation post-bac, le doyen de l’IGEN de physique botte en touche, et nous annonce (remède miracle ?) le souhait d’aller encore plus loin dans les compétences en terminale S.
A titre personnel, je trouve le constat de l’UDPPC cohérant avec ce que j’ai vécu dans mon quotient de professeur de sciences physiques depuis quinze ans: niveau de plus en plus faible constaté en collège, morcellement des contenus avec enseignement en « spirale » au lycée (déconcertant pour certains d’élèves), l’incapacité à mobiliser sur des questions simples les savoirs de SPC ou d’appliquer une formule de maths, des difficultés face au B-A-BA des sciences (logique, observation, justification, confrontation à l’abstrait, démonstration...), l’impression globale de ne rien savoir d’un contenu scientifique devenu flou et complexe,.... Tout ceci ne fait que développer le peu d’intérêt pour des études scientifiques alors que les programmes n’ont jamais été aussi contextualisés et intéressants, alors que les professeurs n’ont jamais été aussi formés et soucieux de la pédagogie (la qualité des documents postés sur ce forum en témoigne), alors que des dispositifs de sciences à l’école (main à la patte) ou au lycée (MPS et option de spécialité SPC) ont été mis en oeuvre, alors que la démarche d’investigation ou les tâches complexes ont révolutionné l’enseignement des sciences,...
Par idéologie depuis les réformes des années 2000, les méthodes ont été préférées aux savoirs. Même si ce virage pédagogique était nécessaire au collège, la première erreur a été de croire (ou de nous faire croire) qu’ainsi nos élèves allaient devenir des petites graines de chercheurs et d’ingénieurs alors que les élèves arrivant du primaire sont de plus en plus faibles en lecture et en calcul (base du savoir), alors que les conditions d’enseignent se dégradent (a-t-on oublié que l’enseignement des sciences a besoin de calme et de concentration ?), alors que l’abnégation à l’effort et au travail (si important en science par rapport à l’échec) n’est plus un acquis pour de nombreux élèves même en 1ère S et TS. La seconde erreur fut le choix (la volonté ?) de ne plus adosser notre discipline aux mathématiques alors que par essence et historiquement nos disciplines sont intimement liées. Ceci a eu par conséquence d'édulcorer les contenus en particulier au lycée, ces derniers se ne limitant plus qu’à l’application numérique d’une formule sortie de nulle part. La troisième erreur a été de décapiter les filières d’excellence C et E (en technique) car elles drainaient en amont les élèves vers les sciences et produisaient en aval de très bons bacheliers, qui pour la majorité se dirigeaient vers les sciences (même fondamentales). Aujourd'hui la filière S est devenue une sorte de « super bac général », où il y a plus de lettres que sciences. (Liste non exhaustive des erreurs....)
Une reforme oui, mais pour réellement remettre à plat tout ce qui ne fonctionne plus, en écoutant en premier les propositions des professeurs de terrain. Par exemple en l’obligeant les groupes TP dès le collègue, ou en repensant une partie des programmes de lycée (surtout 1ère S), en s’appuyant logiquement sur les connaissances et programme des classes antérieures. C’est à dire remplacer le zapping et les théories fumeuses, par des thèmes plus approfondies qui permettent à nos élèves d’acquérir avec le temps adéquat des automatismes, de développer les outils vus maths (fonction, vecteur, produits scalaire et vectoriel, complexe, dérivée et intégrale) pour ainsi leur donner le sentiment de maitrise solide de lois et des outils de base qui permettent d’envisager des études scientifiques sereinement. Une réforme où l'on aurait de l'exigence envers les élèves et de la reconnaissance pour notre fonction (on n'est pas que des éducateurs).
Car au final les élèves de S ne sont pas dupes (surtout les meilleurs), s’ils ne se dirigent plus vers l’université, c’est bien parce qu’il savent que maintenant elle ne mène presque à rien, sauf au métier de professeur, qui n’intéresse plus (bizarre non ?!). Il y a effectivement la médicine (+ pharma, kiné,...) mais cela peut-il être considéré comme des « sciences » ? Même les thèses sont maintenant bien plus accessibles depuis un cursus écoles d’ingé (le niveau y est bien meilleur). Côté BTS voir IUT, la tâches des techniciens sont quasiment automatisées (on branche l’ordi... il y a plus à réfléchir). Quant au aux élèves ingénieurs, c’est pas plus brillant, la mode étant de former au management, à l’analyste boursière, au bizness... bien plus l’innovation, la création et à la recherche. Sans parler du constat, qu’il y a de moins en moins d’industrie en France, que la recherche est malmenée, que l'image de progrès véhiculée dans les années 70-80 est très écornée (Tchernobyl, amiante, pollution,...) D'une manière générale, le rapport aux sciences a changé.
Il ne faut pas une réforme, mais une refonte générale de l’école et de la filière S et technique, au service de projets scientifiques ambitieux et novateurs comme la France a pu déjà le démontrer.
Ps : Ne croyez pas que je suis déprimé en cette rentrée, je m’adapte au mieux et avec ambition au niveau de mes élèves quelqu’ils soient (d’ailleurs très bons l’an dernier), et ainsi qu'à nos missions de l'enseignement. Mais j'estime intimement que l'on pourrait faire vraiment beaucoup mieux avec un peu de pragmatisme et d’ambition.